On apprend tellement de ses poupées !
Loin d'être un jouet comme les autres, la poupée occupe un rôle central dans l’évolution de l’enfant. Compagne privilégiée de jeu, elle libère des aptitudes nouvelles, stimule l’autonomie et permet de cheminer dans la compréhension du monde des adultes.
Jouer à la poupée développe…
... le langage...
« Tu as froid ? », « Il est beau ton pull. », « Dors maintenant ! ». Jouer à la poupée stimule le langage de l'enfant. La prise en compte des sensations, des parties du corps d’autrui, des couleurs, des matières, des formes implique de « sortir » de son « moi ». L’enfant utilise différentes formes d'énoncés : exclamations, affirmations, ou questions dans ses interactions. Le temps est souvent le présent. Les prépositions (« sur », « dessous », « dans ») permettent de spécifier des interactions. Quand l’enfant parle à sa poupée, il communique, car il « fabrique » aussi les réponses de son interlocuteur.
…. Les émotions, les habiletés sociales…
« Pourquoi tu pleures ? Tu as soif ? Voici un biberon. ». Jouer à la poupée développe l’empathie de l'enfant, au travers des émotions que peut ressentir autrui. L’enfant exprime sa bienveillance lorsqu’il tente de rassurer sa poupée : « Tout va bien, je suis là. ». Et lorsqu’il demande à sa poupée de dire « bonjour », « s’il te plaît », « non » ou « merci »,... il exerce une forme d'autorité. La poupée doit obéir et elle devient un médiateur dans les interactions avec d'autres enfants ou des adultes.
… l’imagination…
Au départ, le quotidien des poupées ressemble à celui de l’enfant. Logique : les histoires qu’il invente s’inspirent de son propre vécu. Ses poupées aiment et détestent les mêmes choses que lui. Puis, en grandissant l’enfant enrichi les scénarios. Il découvre qu’il a le pouvoir de créer et de s’amuser avec ses idées : sa poupée peut ressentir des émotions différentes des siennes. L'enfant s’identifie à elle. Il peut reproduire ce qu’il vit et même devenir quelqu’un d’autre ! Il devient l’instituteur, le docteur, le père, la mère ou un personnage imaginaire comme « Maria », cette chipie avec qui il faut sans cesse composer !
… la motricité fine ainsi que les capacités intellectuelles !
Réveiller sa poupée, la changer, la nettoyer, l’habiller, la nourrir, lui donner le bain,… autant d’activités qui permettent, par mimétisme, au tout-petit de mieux appréhender une suite logique d’actions, mais aussi, de réaliser des compromis, par exemple, si la poupée « refuse » de prendre le bain. Jouer à la poupée incite votre enfant à trouver des solutions. Les siennes.
A chaque âge des apports différents
Faut-il offrir un poupon ou une poupée ? Cela dépend de l’âge de l’enfant, car le mécanisme initial dans les jeux de poupées est l’identification. Je m’identifie à la poupée-nourrisson, à la poupée enfant ou à la poupée adulte (poupée mannequin) pour m'amuser avec. Chaque jouet stimule des activités différentes. Les poupons ont un corps souple et favorisent les contacts corporels (les câlins) dans les jeux d’imitation à la différence des poupées plus rigides et qui facilitent les jeux d’habillement.
Avant 18 mois :
Les bébés de moins de 18 mois ne jouent pas (encore) à la poupée. Le poupon présent à proximité de l’enfant, le réconforte par son simple contact visuel ou tactile. Comme un doudou. Vers 18 mois, le poupon s'apparente à un nouveau-né. Les enfants reproduisent sur lui ce qu’ils voient. On le câline, on le berce, on lui donne à manger. L’enfant sait que le poupon lui appartient, il doit s'en occuper. Un excellent moyen de le responsabiliser.
Bon à savoir : Une poupée doit être proportionnelle à la taille de l’enfant. Trop grande, elle est compliquée à manipuler par les petites mains des tout-petits et ne donne pas envie de la protéger.
De 2 à 3 ans :
La poupée devient un partenaire de jeu privilégié. Il répète avec elle des gestes et les événements familiers. Les tout-petits s’immergent aussi avec leur poupée ou leurs multiples poupées dans les problématiques adultes. La poupée permet d’exprimer les émotions et de dédramatiser les situations conflictuelles. Tout cela aide à prendre confiance en soi.
De 3 à 6 ans :
« Je suis le coiffeur et toi, ma cliente. » Les enfants inventent des histoires plus complexes. On y introduit des interdits : « Pas de bonbons avant d’aller au lit ! Non, tu as déjà mangé du chocolat. ». La poupée représente un partenaire de jeu toujours disponible qui « écoute » tous les secrets. La présence de la poupée rassure l’enfant à l’heure du coucher. « Tu me prêtes ton miroir ? Ton nécessaire de vaisselle ? ». Jouer à la poupée est aussi un élément de socialisation essentiel : on enrichit le jeu avec d’autres enfants.
Après 6 ans :
A cet âge, on continue à jouer avec une poupée qui se métamorphose progressivement en mannequin, figurine ou robot. Le besoin d’exprimer des émotions avec des jeux est tout aussi essentiel quand on grandit. Les jeux de poupée deviennent en quelque sorte un journal intime, car ils permettent aux enfants d’exprimer les émotions vécues au cours de la journée. Il est important d’accueillir l’intérêt de l’enfant pour les jeux de poupée. Ce n’est pas un « jeu de bébé » !
Tous les enfants du monde jouent de manière créative avec leurs poupées. Avec elles, ils s'extraient de la dépendance à l'adulte. Une démarche quasi cathartique qui les aide à mieux se comprendre et se situer dans leur rapport aux parents. Contrairement aux idées reçues, les enfants peuvent préférer des poupons au visage stylisé à des poupées réalistes ! Un jouet doit ressembler à un jouet ! Les enfants possèdent assez d’imagination pour faire « vivre » leur poupon ou leur poupée à leur idée. La poupée sert d'exutoire et facilite l'enrichissement du langage, la maîtrise de sa gestuelle ou sa faculté à se repérer dans l'espace. Les jeux de rôles permettent de mieux se comprendre pour cheminer et devenir avec le temps, un adulte épanoui.
Jean-Marc F.